Déconstruire nos croyances
Relocaliser notre production alimentaire, remplacer l’agriculture industrielle par l’agroécologie, manger encore moins de viande, consommer moins mais mieux, moins d’objets plus de frugalité, se déplacer moins et autrement, favoriser les mobilités douces, construire nos habitations en bois, déconstruire notre culture des voyages longues distances, repenser notre économie et la recentrer autour de l’impact en priorité à la rentabilité…tels sont quelques exemples des moyens qui s’offrent à nous pour limiter notre empreinte sur Terre. Finalement ce qu’il nous faut vraiment c’est redéfinir un récit commun d’un nouveau mode de vie plus sobre plus local, se reconnecter à la vie autour de nous, humaine et non-humaine, pour qu’on soit individuellement conscients de l’importance de tout ce qui nous entoure dans notre survie à tous en tant qu’espèces, pour qu’on soit en mesure de détecter et observer l’impact de nos actions.
A chaque fois que je prends le temps de penser à toute cette déconstruction sociale et culturelle que l’on a à opérer, je ne peux pas m’empêcher de me dire qu’il suffirait quasiment de rembobiner de 200 ans pour être dans l’exact état d’esprit dont on a besoin aujourd’hui. Mais alors comment diable on est-on arrivés là et aussi vite ?
La Fabrique du Consommateur
Vers 1800, le monde est une immense paysannerie [1]. Même dans les pays occidentaux les plus riches, l’extrême majorité de la population est rurale. Ce que les hommes consomment alors, ils le produisent souvent eux-mêmes. Les paysans cultivent leur nourriture mesure de ce que permet la terre et construisent leurs habitations avec la pierre, le bois et l’argile de leur région. Dans leurs intérieurs, peu de mobilier, de vaisselle, mais beaucoup d’outils : des faux, des marteaux, des pinces, des ustensiles tournés vers la production. Les villageois récoltaient leurs céréales, pétrissaient leur pain et tissaient leurs vêtements. Tous les objets qui habitaient un lieu y avaient été conçus (…).
L’ordre matériel qui est aujourd’hui le nôtre est rigoureusement inverse. Nos maisons sont préfabriquées par de grandes entreprises puisant leurs matériaux aux quatre coins du continent. Nos intérieurs sont riches en produits industriels, d’objets électroniques complexes. Il y a du tungstène chinois dans nos réseaux électriques, du cobalt congolais dans nos ordinateurs, de l’indium coréen dans nos écrans. Nous consommons des tomates d’Espagne, du café brésilien et du poulet turc.
En deux siècles seulement, la communauté paysanne autarcique s’est effacée pour laisser place à une myriade de consommateurs urbains et connectés.
[1] Anthony Galluzo – La Fabrique du Consommateur,